Une IA Text-to-Image remporte le premier prix d’une compétition artistique.

La semaine dernière, Jason Allen, le patron d’une petite boîte de jeux, a présenté son « Théâtre D’opéra Spatial » (en français dans le texte) au concours des beaux-arts de la foire de l’État du Colorado. C’est l’image du dessus pour ceux qui n’auraient pas compris.

Il étiquette sa soumission comme étant « Jason Allen via Midjourney« , et rajoute en notation ; « Je génère des images avec MJ, je fais des passes avec Photoshop, et j’augmente l’échelle avec Gigapixel.« 

Bref il annonce la couleur.

Il imprime sa création sur une toile et attend le résultat.

Et là, BOUM ; Il gagne le premier prix dans la catégorie « meilleur espoir en art numérique« , devançant les 20 autres artistes de la catégorie. Vous imaginez bien qu’en apprenant la nouvelle, les artistes classiques qui vivent ou espèrent un jour vivre de leur art tirent un peu la gueule…

D’ailleurs, Allen s’y attendait. Il a déclaré sur Discord :

« Je savais que ce serait controversé. Comme il est intéressant de voir comment tous ces gens sur Twitter qui sont contre l’art généré par IA sont les premiers à jeter l’humain sous le bus. En discréditant l’élément humain ! Cela vous semble-t-il hypocrite ?« 

À un journaliste qui l’interroge, Jason répond :

Ça m’a pris du temps. J’ai consacré plus de 80 heures à ce projet. J’ai généré plus de 900 images de cette invite particulière que j’ai peaufinée. L’IA est un outil, comme un pinceau est un outil, et il faut toujours une force créatrice derrière l’outil.

Certains ont même été jusqu’à parler de tricherie, alors que même l’organisateur dit que tout est parfaitement conforme au règlement. Scott Stoller, directeur général de la foire d’État a déclaré à un journaliste présent :

« Nous n’avons rien vu dans notre règlement qui interdise cette activité. Mais cela ouvre un débat sur la question de savoir si nous devons évaluer cela pour l’année prochaine lorsque nous définissons les règles. Cela doit-il être exclu ? Je pense que c’est une conversation que nous aurons avec la communauté artistique après la foire de cette année. »

Au-delà de la couverture médiatique nationale de l’évènement aux États-Unis, cette histoire illustre clairement la rapidité avec laquelle l’art généré par l’IA a progressé. Les systèmes ont considérablement repoussé les limites de ce que les ordinateurs sont capables de produire après avoir été entraînés sur des milliards de photographies en ligne.

Mais est-ce le procédé lui-même ou sa mise à disposition du grand public qui soulève de tels torrents de réactions indignées ? Ou plus légitimement, l’inquiétude de personnes se disant qu’elles risquent de perdre leur gagne pain au profit d’une innovation technologique majeure comme l’ordinateur individuel, Excel et Internet ?

Les techniques de conversion texte en image ont rapidement gagné en sophistication et sont devenues l’un des sujets d’IA les plus populaires. Les meilleurs exemples sont DALL-E 2 et Midjourney actuellement mais de nouvelles IA comme Imagen de Google et Stable Diffusion pointent déjà le bout de leur nez.

Alors… Cette vague d’indignation artistique va-t-elle bannir et jeter l’opprobre sur les outils d’intelligence artificielle « texte en image » et par la même occasion sur leurs utilisateurs qui vont s’en détourner ? J’en doute. Peut-être va-t-elle produire carrément l’opposé.

Jason, lui, a déjà choisi son camp.

Après avoir récupéré les 300€ de prix et vendu deux œuvres dont la gagnante pour 750€ (à mon avis il a fait une grosse bêtise là. Dans 20 ans la première création d’une IA qui a gagné un prix, ça vaudra des millions…), il déclare :

« Je ne vais pas m’arrêter maintenant », a-t-il déclaré. « Cette victoire n’a fait qu’enhardir ma mission.«